Comprendre l'intense hybridation générique qui se produit dans la littérature européenne autour de 1930, telle est l'ambition de ce volume collectif. Les phénomènes de circulation entre création littéraire, discours critiques et politiques, pratiques de relevés et d’enregistrement y sont étudiés dans les romans, en poésie et dans diverses écritures journalistiques, jusqu’aux revues et plaquettes publicitaires. Ces usages sont rapprochés de l’ambition documentaire affichée de certains romans, chroniques ou récits, des expérimentations poétiques dans le texte ou dans la mise en page, mais aussi de l’esthétique documentaire telle qu’elle se met alors en place dans la photographie ou le cinéma. Dans l’entre-deux-guerres, la question du document est en effet une des portes d’entrée dans la sphère des relations entre littérature et journalisme. Cet ouvrage se penche ainsi sur les usages du document évoqués, convoqués ou insérés dans les oeuvres littéraires dans le domaine français, mais aussi italien, allemand, belge et roumain. On y croise aussi bien Georges Bataille, Paul Morand, Sebald, Lussu, Mario Praz, les surréalistes ou encore Mac Orlan et Roland Dorgelès. Avec la fin du XIXe siècle et la période contemporaine, qui connaît un renouveau des esthétiques documentaires en littérature, la décennie 1925-1935 constitue un âge d’or, celui de la « convergence entre divers phénomènes d’hybridation générique en Europe ». Le présent volume entend penser ensemble des phénomènes considérés comme hétérogènes en se concentrant sur 1930 et en proposant plusieurs ouvertures vers des pratiques littéraires et artistiques contemporaines et vers les usages muséaux. Ce numéro de La Licorne est dirigé par des spécialistes de littérature française et italienne de l’entre-deux-guerres du Groupe de recherche belge MDRN (www.mdrn.be) qui travaille sur les dynamiques et les renouvellements de l’histoire littéraire dans la littérature européenne entre 1900 et 1950.