Les guerres et les invasions constituent la trame principale de l'histoire lorraine. Avec leurs cortèges de destructions, de deuils, de souffrances physiques et morales, avec leurs héritages successifs dans la mentalité collective, elles constituent désormais un vaste secteur de recherches fécondes et passionnantes. Dans cet essai nous avons d'abord tenté de rappeler que l'espace stratégique lorrain a tenu une place éminente pendant la grande guerre. François Roth observe avec raison que les opérations militaires dans l'Est de la France souvent reléguées au second plan, méritent un examen plus attentif. A-t-on assez insisté sur l'importance des combats d'août et septembre 1914 entre Verdun et le Grand-Couronné ? Ils assurèrent cependant la solidité de l'aile droite française pendant le redressement de la Marne. Si l'on a, à juste titre, beaucoup parlé de Verdun (et du chef qui s'y illustra), il importe de se souvenir que cette bataille marque un tournant dans la conduite de la guerre. Elle a conservé une résonance particulièrement tragique chez les survivants et fut le creuset d'où surgirent les principes qui, systématisés, préparèrent l'effacement des gros bataillons au profit du matériel : les longues théories de camions de la Voie sacrée, les escadrilles organisées, sont autant d'idées forces que nous retrouverons - à la dimension industrielle - en 1940.