La mystique dite « rhénane » est en fait une mystique dominicaine dont les sources (Denys, saint Augustin) sont étrangères à l’espace germanique et dont les traces sont plus anciennes à Paris qu’à Cologne. La Réforme signe le moment presque exclusivement allemand de l’histoire religieuse. Homme de foudre et de foi, Luther privilégie dans le prolongement de la mystique une relation personnelle avec Dieu mais rompt brutalement avec la scolastique sur les points essentiels de la doctrine. Des facteurs idéologiques et politiques, le respect des autorités accentuent la rupture avec l’Eglise mais aussi avec l’humanisme (Erasme) coupable de défendre le libre arbitre. De Sebastian Franck à Jakob Böhme et Angelus Silesius cette ligne rigide suscite désarroi et dissensions. En revendiquant la plus grande fi délité à Luther, le piétisme marque un repli subjectif tout en donnant un nouvel élan caritatif à la doctrine. La naissance religieuse de l’Allemagne est aussi, à l’écart des autres nations, une naissance politique marquée jusqu’à l’époque contemporaine par la confusion des deux domaines au bénéfi ce de la puissance politique.