De nombreux écrivains ont eu recours au texte biblique comme à un réservoir inépuisable de thèmes, d’images, de concepts, de structures archétypales transposables ou renouvelables à l’infini. On peut ainsi penser qu’il existe un lien caché mais essentiel entre le texte des Écritures et le travail d’écriture, et singulièrement d’écriture poétique. La somme de poésie de Patrice de La Tour du Pin est l’une des œuvres contemporaines où le substrat biblique s’affirme le plus fréquemment : un simple regard y révèle la présence de psaumes, d’hymnes ou de titres significatifs comme “L’Exode”, “Prières de la Mer Rouge”, “La Terre Promise ”. Il ne s’agit pas là d’une simple thématique religieuse ou d’une imitation formelle qui seraient assez banales chez un auteur au catholicisme affirmé mais d’une intense participation au “monde ” et à la “vie ” qu’engendre le récit biblique. Les temps forts de celui-ci correspondent, de façon symbolique ou métaphorique, à des moments-clés de l’acte même de création : germination d’un monde singulier, mort d’une certaine individualité et naissance du véritable moi créateur, révélation d’un sens ou d’un univers structuré… L’expérience d’écriture elle-même déchiffre, mime, reproduit, en les transposant, des étapes fondamentales du texte sacré et les principales opérations de la poésie trouvent dans certains schémas bibliques un nouvel éclairage sur leurs modalités et leur finalité.