L'écriture de Marguerite Duras a souvent été définie comme itinéraire de raréfaction, de dépeuplement, et la production de l'écrivain, dans son évolution, confirme ce continuel travail d'effacement qui caractérise à plus d'un titre le récit durassien. Il s'agit ici de percevoir les stratégies ainsi que l'enjeu d'une telle pratique qui met en danger la possibilité de la fiction, mais de comprendre aussi comment et pourquoi, quelles que soient les menaces qui pèsent sur elle, cette fiction persiste cependant à se dessiner et à faire sens. C'est en effet un lieu paradoxal que semble épouser l'écriture de Marguerite Duras quand elle vient tracer une disparition en enlaçant des protocoles de représentation, quand elle donne à voir l'exténuation de formes romanesques qu'elle convoque en même temps de façon obsédante. La pratique narrative du Navire Nigt engage un questionnement que le roman moderne porte sur lui-même au oment où il se crée: dans les contradictions de son parcours, le récit durassien inscrit ses empreintes au seuil de l'improbable, de l'illisible, là ou l'effacement se fait lecture.