On ne devient pas témoin par hasard. Dans cette démarche, jouent autant des facteurs privés (des motivations, une trajectoire particulière, une rencontre…) que publics (une attente sociale, un programme politique, un procès…). Si un individu prend la parole pour transmettre son expérience à des tiers, la régularité – voire la routinisation – de ses interventions peut faire de lui un « professionnel ». On trouvera donc au cœur de ce volume, comme des deux autres qui suivront, la notion de « carrière testimoniale ». Inspirée de la sociologie des professions ou des groupes professionnels, cette notion permet d'observer et d’analyser le devenir des témoins. En l’occurrence, les contributeurs de l’ouvrage balisent les conditions dans lesquelles des personnes entament une carrière et les étapes de celle-ci, qui peuvent avoir un impact sur la teneur de leurs propos. S’intéresser à des « témoins itératifs » permet de mieux comprendre la configuration des témoignages, qu’ils concernent la famine en Ukraine, la Seconde Guerre mondiale, la guerre d’Algérie, la dictature en Argentine ou encore le génocide au Rwanda.